Marivaux
Mise en scène Irène Bonnaud
Avec : Dan Artus, Marie Favre, Roland Sassi, Ismaël Ruggiero, Sophie-Aude Picon.
Scénographie Claire Le Gal – Costumes Nathalie Prats – Lumière Daniel Levy – Régie générale Christophe Boisson – Régie Lumière Victor Dos Santos – Son Jean-Marc Bezou – Maquillage et coiffures Catherine Saint-Sever – Assistant stagiaire à la mise en scène Maxime Contrepois - Photos © Vincent Arbelet.
Production déléguée : Théâtre Dijon-Bourgogne
Il y a quelques années, lisant les pièces de Marivaux, j’avais été frappée par l’étrangeté du Prince travesti, car la pièce semblait résumer l’œuvre entière tout en s’en échappant. On y trouve ce qu’on sait être la manière de Marivaux : la cruauté des rapports amoureux, l’humilitation de n’être pas aimé, le regard qui sait interrompre tout discours et provoquer comme une nouvelle naissance des personnages, la brutalité des inégalités sociales et la force de leur renversement momentané, etc.
On l’a souvent dit, Marivaux ne parle que d’amour et d’argent, mais ici, il ne reste pas seulement attaché à la sphère privée de la famille (les contrats de mariage et captations d’héritage des pièces les plus tardives) ni à celle, intime, des hiérachies amoureuses et sociales. Il leur juxtapose la sphère du pouvoir d’Etat : la nomination d’un chef de gouvernement, la guerre avec l’Etat voisin, la possible répression d’une révolte populaire sont les épisodes qui font du Prince travesti une pièce directement politique où l’enchevêtrement des histoires d’amour, des négociations internationales et des rapports de classes paraît plus inextricable que jamais.
Cette densité est d’autant plus forte que le monde décrit par Marivaux est le nôtre – au berceau. L’invention des billets de banque et de la spéculation financière, de la publicité et de la mode sont de ce premier tiers du dix-huitième siècle que Marivaux observait en journaliste autant qu’en dramaturge. Dans la pièce, toutes les relations humaines et tous les idéaux politiques sont gangrénées par la peur et la corruption car au palais de la Princesse de Barcelone, tout s’achète et tout se sait. L’alliage actuel entre libre circulation de l’argent et contrôle toujours accru des individus, ultra-libéralisme économique et obsession sécuritaire se distingue déjà à l’horizon du Prince travesti.
Joschka Schidlow, Le Prince travesti
Catherine Robert, Le meilleur du théâtre populaire
Frédéric
Madame, vous m'avez dit quelquefois que je présumais mal de Lélio
Voyez l'abus qu'il fait de votre estime
La princesse
Taisez-vous
Je n'ai que faire de vos réflexions
Pour toi, je vais t'apprendre à trahir ton maître
A te mêler de choses que tu ne devais pas entendre et à me compromettre dans l'impertinente répétition que tu en fais
Une étroite prison me répondra de ton silence
Arlequin
Ah ! ma bonne dame
Ayez pitié de moi
Arrachez-moi la langue
Mais laissez-moi la clef des champs
Miséricorde, ma reine !
Je ne suis qu'un butor
Et c'est ce misérable conseiller de malheur qui m'a brouillé avec votre charitable personne
La princesse
Comment cela ?
Frédéric
Madame
C'est un valet qui vous parle, et qui cherche à se sauver
Je ne sais ce qu'il veut dire
Hortense
Laissez, laissez-le parler, Monsieur
Arlequin
Allez, je vous ai bien dit que vous ne valiez rien
Et vous ne m'avez pas voulu croire
Je ne suis qu'un chétif valet
Et si pourtant, je voulais être homme de bien
Et lui, qui est riche et grand seigneur, il n'a jamais eu le cœur d'être honnête homme
Création le 28 février 2008 à la salle des fêtes Marcel Joyeux, Luzy (Nièvre)
Développé avec Berta